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Un soir, un livre 2023

Cercle de lecture convivial ouvert à tous, qui fonctionne sous la houlette de Jeanne Bem

On se rencontre une fois par mois environ et on discute du livre choisi lors de la précédente rencontre.
On peut venir aussi juste pour attraper le désir de lire.

 


Prochaine rencontre

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Voir le compte-rendu sur la page 2024




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Mardi 12 décembre 2023

image : /upload/Annee 2023/Un soir un livre 2023/UnSoir_23_Leichtner_Memoirs.jpg

Nous étions sept hier soir chez moi pour parler du livre de Thomas Gabriel Leitchner, Mémoires du Danube. Quatre persones s’étaient excusées : Jeanne Bem, bien sûr, à qui nous souhaitons une bonne convalescence, Danièle Grilli à qui nous souhaitons une voix bien claire, Michèle Chazal et Colette Vallée
            Danièle avait envoyé un message et je me permets de reprendre ses mots car ils reflètent une partie de l’opinion générale : Mémoires du Danube est un livre à la fois léger et grave. Il obéit aux codes d'un roman policier mais avec des références personnelles qui lui donnent un "plus" (on pense parfois aux livres de Modiano). On s'attache aux personnages, à leur histoire... J'ai eu un peu de mal à accepter certains rebondissements mais globalement j'ai bien aimé ce livre.

            Certaines ont été plus radicales, Béatrice a dit : C’est écrit par quelqu’un qui n’est pas écrivain ! Plusieurs ont trouvé que le récit, par moments, penchait vers le roman de gare… Par exemple, on a bien ri – nous n’étions que des femmes – avec ce passage d’un érotisme très convenu, où le narrateur devine la naissance des seins de la pulpeuse Helena quand elle se penche vers son verre de cognac, d’une grande marque bien sûr...  Héléna est un personnage ‘prétexte’. L’intrigue amoureuse, avec ses archétypes, est plaquée, peu crédible, d’autres passages, aussi concernant le narrateur détective. Béatrice a bien cerné les choses en disant : Il présente des personnages alors qu’on voudrait des personnes. Et Quand on referme le livre, il n’y a pas un seul personnage qu’on pourrait décrire. À part Héléna.

            De mon côté j’ai un peu tiqué, on ne se refait pas !! sur l’emploi mélangé du passé simple, du passé composé et même trois fois (je crois) un subjonctif imparfait venu comme cheveux sur la soupe. Passons !           
            Cependant, là n’est pas le sujet du livre. Le narrateur, détective sans clients, est contacté en 2012 par une vieille dame qui sait qu’il est d’origine juive et partiellement d’origine hongroise. C’est qu’elle veut retrouver le hongrois Andràs Ferencz, un amour fou de quelques jours, mais qui est le père de sa fille de 40 ans. Le détective cherche et trouve. Et ce faisant, il voit par hasard une photo des temps de guerre (1944) où il découvre un homme qui ressemble absolument à son propre père et qui tient dans ses bras un bébé. Bouleversé il cherche, lui aussi dans son passé. Et trouve, auprès d’Anna, sa vieille grand-mère juive, le secret bien caché.
            Il y a donc deux récits qui à la fois se succèdent et s’entremêlent. Et même dans le premier récit concernant Andràs, il y a aussi deux aspects : le très jeune Andràs qui s’est engagé dans les redoutables Croix fléchées, brutaux partisans hongrois des nazis (cf film Lacombe Lucien), et le Andràs d’après, qui, tout le restant de sa vie, cherche à réparer en poursuivant les nazis cachés.
            À ce sujet, un chapitre a retenu notre attention sur ce thème : Peut-on pardonner ? Est-il possible à un Juif de pardonner ? Avec divers points de vue, de Simon Wiesenthal, Matthieu Ricard, Simone Weil…
            L’auteur s’est sérieusement documenté sur les lieux (Vienne, et surtout Budapest), les événements, et la période, disons de 1938 à la fin de la guerre. Nous avons toutes appris là beaucoup de choses. Il s’est passé là-bas aussi, des choses horribles.
            Au sujet du titre. Au départ, c’était Mémoires de l’eau, changé par l’éditrice, en accord avec l’écrivain, en Mémoires du Danube. Pertinent car en écho avec ce que disait souvent le père du narrateur Quand je suis au bord de l’eau, j’ai l’impression que mon père m’appelle. Le père du narrteur s’est suicidé au bord de la Seine. Pas de divulgachis, c’est la première page !           

            L’avant-propos (et un peu les dernières lignes de l’ouvrage) a fait l’objet d’une discussion particulière car il a des allures d’énigmes que nous n’avons peut-être pas totalement résolues. Que penser du ‘nom de plume’ pour cet ouvrage-là ? Qui parle ? Auteur ? Narrateur ? Pour qui ? Pour un personnage de fiction ? Pour quelqu’un de sa vraie famille ? Pour nous ? Que nous dit-il ? Ce flou, il ne s’en cache pas puisqu’il prévient : Seul le roman peut m’aider dans ce voyage où j’aurai tant à imaginer. Et aussi, s’adressant à Toi, non pas toi, le lecteur, mais à un personnage de sa vraie vie, ou de sa fiction... il dit : Je devrai… t’inventer.

            On trouve dans les remerciements : L’écriture de ce roman, dont la part autobiographique est surtout présente au niveau de l’inconscient et des bribes qui m’ont été révélées, a fait appel à la documentation et à l’imagination. Elle a été étayée par les infos apportées par Marianne, ma cousine germaine de 94 ans qui, comme d’autres juifs hongrois, a subi les exactions des SS et des Croix fléchées, avant de s’enfuir de Budapest pour aller s’installer en Australie. Bien sûr, et forcément, l’autobiographie et le roman, les deux se mélangent toujours plus ou moins, et pas toujours volontairement. C’est un roman très ambigu : à la fois c’est vrai, ou ça cherche à l’être, ou à faire semblant de l’être ? et ça ne l’est pas ! C’est un faux, un déguisement, pour dire une vérité qui, néanmoins, reste cachée, volontairement ou non...

            Personnellement, j’ai moyennement apprécié ce livre : beaucoup de doc, peu de chair et d’émotion malgré ce qui est raconté… Mais il peut éclairer sur ce que c’est qu’écrire, sur le but, le comment et le pourquoi (consciemment ou non) on écrit.
Joselyne Bernot-Perdreau

 

 

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Mardi 7 novembre 2023

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Nous étions treize (quatorze au buffet!) hier soir chez Michèle et Gérard (merci pour leur accueil!) et nous avons discuté du roman "Mamba Point Blues" en présence de l'auteur, Christophe Naigeon.

Ainsi, nous avons pu profiter de ce genre de situation, puisque Christophe nous a donné toute sorte d'explications sur sa longue carrière de reporter documentaliste (souvent sur des théâtres de guerre ou d'après-guerre), sur sa rencontre avec l'Afrique, sur la focalisation de son intérêt sur un pays, le Liberia, et sur sa façon de travailler.

Le Liberia est un pays d'Afrique de l'Ouest tout à fait particulier: artificiellement créé au 19e siècle par une re-migration, organisée à partir des Etats-Unis, d'Afro-Américains anciens esclaves, il répondait à un objectif à la fois philanthropique, religieux, mercantile et géo-politique. Fasciné par le Liberia, Christophe Naigeon s'est fait historien, et il a fait plusieurs séjours aux Etas-Unis pour des recherches dans les archives et pour rencontrer des spécialistes. A l'origine, il pensait écrire un travail scientifique. Le projet du roman, finalement développé en trilogie, n'a émergé que plus tard, avec l'idée d'intéresser le public en opérant une fusion entre la réalité historique et des personnages de fiction.

Le premier roman de Christophe Naigeon, "Liberia" (2017) était une fiction sur fond historique vrai, située au 19e siècle. Ce deuxième roman (paru en 2021 et maintenant publié en livre de poche) reprend certains thèmes du précédent mais sur fond historique du 20e siècle. Il commence en 1918 et s'arrête en 1980.

On sait que le Liberia a connu à la fin du 20e siècle deux terribles guerres civiles successives, en gros entre 1990 et 2003. Ce pays va encore servir de cadre et d'objet d'investigation dans un troisième roman, à paraître en 2024, qui aura pour personnage principal un enfant-soldat et qui sera étroitement lié à l'expérience de l'auteur. Comme il nous a dit: "Le volume 3, c'est le film que je n'ai pas tourné".

Sur un plan proprement littéraire à présent: "Mamba Point Blues" a été largement apprécié par les lecteurs et lectrices du groupe, et la discussion a été très sympathique et animée. Le roman fait 500 pages dans l'édition des Presses de la Cité, et parfois certains épisodes ont paru trop longs ou moins intéressants: chacun a sélectionné ceux qu'il préférait. L'écriture est visuelle et même audio-visuelle, elle est sous l'influence du film et de la musique. Le romancier a une passion pour le jazz, ce qui donne de très belles pages où sont évoqués des concerts endiablés, souvent improvisés, mélangeant les instruments du jazz classique et des percussions d'Afrique. 

Le personnage principal, Jules, est très attachant, il est à la fois européen et africain, noir et blanc, il se déplace sur trois continents, il est libre! A la base, Jules est un musicien d'instinct et de génie. 

On a trouvé amusantes et convaincantes les rencontres des personnages de fiction avec des célébrités telles que Joséphine Baker ou Graham Greene (une vieille recette du roman historique, mais ça marche!). "Mamba Point Blues" est un roman d'amour (ne pas oublier la trame romanesque qui le soutient), il nous divertit comme Alexandre Dumas, nous fait voyager comme Jules Verne, et nous instruit comme les médias d'aujourd'hui. Car Christophe Naigeon est aussi un partisan de la "littérature enrichie" et il prévoit des marque-pages avec QR code qui permettraient au lecteur d'accéder à des explications et des vidéos.
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Vendredi 29 septembre 2023

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Nous étions dix hier soir chez Djinn et Christophe, merci à eux pour leur accueil. Le livre à examiner était "Dans la dèche de Paris à Londres" (1933), de  George Orwell, qui s'appelait à l'époque encore Eric Arthur Blair. Ce récit, sorte de journal brut d'une expérience un peu extrême de la misère sociale dans laquelle l'auteur s'est immergé pendant à peu près deux ans, en a rebuté certains. Mais dans la discussion, beaucoup d'éléments constructifs ont été apportés, si bien qu'au total ce livre a été plutôt positivement apprécié.

Déjà, c'est toujours intéressant pour les lecteurs français de se voir au miroir d'un regard anglais (ou américain). Il est vrai qu'Orwell n'est pas tendre. Pour rappel, voici quelques livres plus bienveillants: Henry Miller, "Jours tranquilles à Clichy"; Ernest Hemingway, "Paris est une fête"; Jean Rhys, "Quatuor" (qui est un roman basé sur sa vie à Paris entre les deux guerres). Ces écrivains eux aussi sont dans la dèche (modérément), mais ce sont des artistes qui fréquentent la bohème parisienne, souvent dans un entre-soi anglo-saxon. 

Orwell, lui, ne décrit pas la Ville-Lumière mais son "lumpen prolétariat" (comme dirait Marx). Il faut souligner qu'il s'est trouvé projeté dans un moment particulièrement violent parce qu'on est juste après le krach de 1929, qui a créé un chômage de masse qu'on n'avait jamais vu jusqu'alors. Les descriptions de "Dans la dèche" sont d'un réalisme impitoyable, on entre vraiment dans le monde des bas-fonds. Le sordide est racheté par une grande attention à l'humain - portraits sur le vif, anecdotes, conversations comme directement "enregistrées". En même temps, on est frappé par le ton détaché, l'espèce de distance que l'auteur, un intellectuel, maintient avec ses compagnons de misère. Et surtout, ce qui choque sérieusement aujourd'hui, c'est la misogynie diffuse, le racisme (qui consiste à considérer les personnes selon leur origine ethnique) et (pire encore) l'antisémitisme (dont l'auteur ne semble absolument pas se rendre compte).

Clairement, en 1930, le but du jeune Eric Blair n'était pas de porter aux opprimés la bonne parole révolutionnaire, comme le fera par exemple plus tard Robert Linhart qui décrira dans "L'établi" son immersion dans une usine Citroën. Le futur auteur n'est pas encore politisé, il aura encore beaucoup à faire pour y parvenir. Il vient de loin, d'une petite classe moyenne implantée dans la colonie. Son père a été fonctionnaire en Inde; lui-même il a été élève de lycée à Eton, mais comme boursier, donc soumis aux préjugés de classe des autres. Après le bac il a pris un poste en Birmanie dans la "Indian Imperial Police". Cependant le contexte colonial l'a déjà éclairé quelque peu sur l'exploitation des déshérités. S'il est "dans la dèche" c'est parce qu'il a rompu avec ce premier job, qu'il s'est éloigné de sa famille, et qu'il a fermement décidé de devenir écrivain. Son but en écrivant "Dans la dèche", c'est tout simplement d'arriver à publier un livre! Sa véritable formation politique se fera en 1936, en Espagne (voir "Hommage à la Catalogne"). A partir de là, nous aurons le "véritable" Orwell, journaliste à Londres pendant la guerre et romancier auteur de deux chefs d'oeuvre du 20e siècle, "La ferme des animaux" et "1984". Mais tout de même - comme on l'a remarqué dans la discussion - il se produit une légère évolution au cours du livre, bien visible dans les derniers chapitres de la partie "Londres". La "leçon" de solidarité qui s'exprime dans le dernier paragraphe est énoncée avec un humour...anglais.

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Jeudi 31 août 2023

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Nous étions onze hier chez Nicole G. (merci à elle!) et il y avait quatre excusées.

Au début de la réunion on a eu une courte discussion dont il est sorti qu'on va faire un effort pour mieux faire connaître notre groupe et son activité.

Le 4e roman de Hoai Huong Nguyen n'est peut-être pas son meilleur, en tout cas il a suscité une grande discussion très animée. Ceux qui connaissaient son 1er roman ("L'ombre douce") se demandaient pourquoi et comment "Tendres Ténèbres" est si différent, et dans une certaine mesure déçoit. La plupart des lecteurs et lectrices sont restés perplexes, désorientés. Ils se sont sentis étrangers à ce texte.

Pourtant les deux titres sont oxymoriques l'un et l'autre, et dans "L'ombre douce" la façon euphémisante dont l'autrice évoquait les horreurs de la guerre en Indochine nous avait déjà frappés. Dans "Tendres Ténéèbres" nous sommes en France, dans une Normandie des années 1950 (tranche historique identique, mais aucune allusion à la grande Histoire). Donc les deux romans ont la cruauté en commun. Mais cette fois l'horreur s'installe dans la sphère intime: un couple d'amants britanniques logés dans une villa de location est observé, surveillé même, par un très jeune homme qui fait ainsi sa première expérience sexuelle "par procuration", car Annabel, cette jeune femme qui l'attire lui aussi (mais sans retour), s'est enfermée dans une relation perverse avec un homme dangereux.

Roman sur le mode du "je". L'adolescent est le narrateur. Le petit monde de la petite ville balnéaire normande est évoqué, c'est un décor. Le thème de la passion tragique est "romantique", les références vont au 19e siècle. Mais le groupe a trouvé les personnages peu crédibles et le roman artificiel. Le style est neutre (ce devrait être la langue française vers 1950) et en même temps parfois trop fleuri, avec beaucoup d'adjectifs attendus. On peut concevoir à la rigueur la frustration et l'obsession du jeune homme, et les incertitudes de l'adolescence. Mais dans l'ensemble, les personnages flottent: deux étrangers, et un jeune homme qui se trouve dans une vacance. L'autrice a soigneusement éliminé les attaches, les parents. Les familles (ou ce qu'il en reste) sont ailleurs, presque inexistantes. Le roman est sur fond de vide. On sent qu'on est devant un objet littéraire pur, une fabrication, un artefact. En tout cas, si on lit "Tendres Ténèbres" au premier degré.

Donc le groupe est parti dans un débat sur la lecture au second degré. "Tendres ténèbres" pourrait être discrètement, avec modestie mais avec une détermination secrète, un livre sur la difficulté à écrire dans les temps modernes une fiction qui serait originale et unique. "Tout a été dit..." - l'idée certes n'est pas nouvelle non plus. Dans ce cas, ce vide, ces vagues et nombreux intertextes, ainsi que cette artificialisation du style aux limites du pastiche, ce seraient des signaux pour inviter à une lecture au second degré... Par exemple, un rapprochement a été fait avec le roman de Robbe-Grillet "La jalousie", un autre huis clos à trois personnages dont l'un, le mari jaloux, est un personnage complètement non incarné dont la seule fonction est d'être un voyeur. Nous sommes restés sur cette hypothèse, sans pouvoir trancher.

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Lundi 10 juillet

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Alice au pays des merveilles, De l'autre côté du miroir

Lundi il y a eu plusieurs désistements de dernière minute... En tout cas ceux, celles plutôt qui étaient là ont bien aimé la (re)lecture des deux "Alice" et la discussion sur l'art et la personnalité de Lewis Carroll. Ainsi que l'accueil de Chantal!

Tout d'abord, en publiant "Les aventures d'Alice dans le Wonderland" en 1865, Lewis Carroll (Charles Dodgson, répétiteur de mathématiques dans le collège d'Oxford où il avait fait ses études) a donné un grand coup de balai dans la littérature pour enfants typique de la société victorienne, qui était ennuyeuse au possible et lourdement moralisatrice. Il a lui-même énoncé fortement son principe directeur: "Pas de morale!" Ce principe ainsi que la fantaisie débridée du monde qu'il inventait expliquent le succès immédiat du livre en Angleterre et sa diffusion ensuite sur toute la planète. Le 2e livre, "De l'autre côté du miroir", a été conçu tout de suite dans la foulée du premier et publié en 1871. On a consacré un moment à discuter des difficultés de traduction: un défi que chaque traducteur relève, successivement.

Rien de plus "British" en effet que les deux "Alice". La fantaisie ne tombe pas du ciel, elle s'appuie sur une grande connivence culturelle avec son premier lectorat. Par exemple, le Lion (force) et la Licorne (pureté) viennent du blason de la couronne d'Angleterre. Certains personnages proviennent de jeux de mots: la Tortue à tête de veau (Mock Turtle) vient d'une appellation culinaire (Mock Turtle Soup: fausse soupe à la tortue - sauf que dans le livre c'est la tortue qui est "fausse"). Le Papillon-pain-beurre est dérivé du simple mot "papillon" en anglais: butterfly (avec un jeu de mots sur "butter"). Lewis Carroll amuse les enfants avec des jeux de langage et aussi des jeux de pensée. Quand la Chenille conseille à Alice à manger un morceau du chapeau du champignon pour grandir ou pour raccourcir, elle lui dit: "Prends-en d'un côté... ou de l'autre côté..." Mais comment choisir "un côté" en face d'une circonférence?

Les deux livres ont pour héroïne une petite fille de la bourgeoisie victorienne, bien élevée, mais audacieuse et surtout intelligente, dotée d'un esprit critique, car elle est arrivée à l'âge de raison (sept-huit ans). Pour les jeunes enfants la "vraie" lecture, page par page, est un peu difficile, mais plus tard ils y reviennent. Les deux "Alice" sont un délice pour les adultes, du moins certains adultes. Lewis Carroll n'émet jamais de référence précise concernant la société, le système politique, encore moins la religion (personnellement, il n'a aucun problème avec la foi et il est lui-même entré dans les ordres, sans aller jusqu'au bout cependant). Mais comme tout bon satiriste et humoriste, il observe et touche juste, et le lecteur d'aujourd'hui reconnaît notre monde à nous. Par exemple, quand les deux jardiniers (cartes à jouer) repeignent en rouge des roses blanches pour que la Reine ne les fasse pas décapiter, nous reconnaissons le fonctionnement de toutes les dictatures! A ce propos, les deux livres n'ont rien de "merveilleux" ou de "féérique", et surtout rien de mièvre. Alice rencontre des personnages qui ont des obsessions bizarres et dont beaucoup sont ronchon et même agressifs, elle essaie de les décrypter et de leur tenir tête tout en évitant de les heurter, car elle est polie! Il passe de la cruauté à travers les pages. Si personne n'est vraiment décapité, il y a un bébé qu'on se lance comme un paquet d'un bout de la cuisine à l'autre, chez la Duchesse!

On a abordé dans la discussion tous les thèmes que la critique littéraire relève chez Lewis Carroll. On a évoqué son rapport aux femmes, à la sexualité, et bien sûr son usage de la photographie! Sa personnalité, on peut la cerner à partir de son Journal (dont une main inconnue a expurgé certaines parties), de ses lettres (les lettres humoristiques aux petites filles! et les lettres sérieuses aux mamans), des témoignages d'époque plus ou moins fiables. Elle transparaît aussi dans les pages des deux romans: l'auteur y a beaucoup mis de lui-même. L'hypothèse de son biographe Morton N. Cohen (Macmillan, 1995) est que dans le premier "Alice" l'auteur s'identifie à la petite fille, il revit ses problèmes d'enfant, sa difficulté à s'insérer dans le monde qui l'attend; le second "Alice" marque une distance (la famille Liddell a rompu avec lui pour une raison mal élucidée, et puis Alice Liddell grandit, elle sort de l'enfance, en 1871 elle a 19 ans): ce livre-là ferait le deuil de leur amitié qui a connu un sommet vers 1860. Lewis Carroll cette fois met en scène la vraie Alice, dans son vrai salon, avec ses chats et la cheminée au miroir, et ce qu'il y aurait "derrière". Dans ce monde parallèle, qui se joue sur un vrai échiquier, elle est un "pion" qui franchit les cases, elle surmonte des obstacles et au bout du trajet elle devient "Reine" c'est-à-dire adulte. Lewis Carroll se représente sous les traits du Cavalier blanc, un personnage triste et maladroit, pour qui Alice (quand il s'en va) ressent de la pitié et de l'affection.

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Vendredi 25 mai 2023

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Beaucoup de personnes étaient excusées hier, pour diverses raisons. Mais vous avez manqué quelque chose: une superbe fin d'après-midi sur la terrasse d'Elisabeth, avec cette vue incroyable, cette verdure tout autour, et un grand concert d'oiseaux! (et des bonnes choses à manger)

C'est vrai que les 380 pages des "Femmes du bout du monde", cela pouvait décourager des lectrices ou lecteurs qui avaient déjà beaucoup lu en ce mois de mai dédié aux livres... Pourtant, le livre se lit facilement, il est attachant, entraînant, intéressant, bien écrit en plus.

On résume tout de suite: un roman de Mélissa Da Costa (à 32 ans elle en a déjà publié plusieurs) ne peut pas décevoir!

C'est une typique autrice de bestsellers - dans son cas en tout cas, le mot n'est pas péjoratif. Elle nous emmène le plus loin possible géographiquement: en Nouvelle-Zélande, au bout du bout du sud: en face de la plage il n'y a plus que le cercle polaire. Elle nous fait tout connaître de l'endroit, on a droit à une vraie ethnographie égrenée par petits bouts - sur le paysage (écossais), sur les saisons (renversées), sur la rudesse genre Far West de ce coin perdu, sur les voisins maoris et les légendes maories, sur les plantes et surtout les animaux de la mer (car un personnage mort, dont l'ombre plane sur l'histoire, était naturaliste). Voici un livre empreint d'une poésie rugueuse, avec une intrigue bien ficelée, et beaucoup de psychologie traitée avec pas mal de finesse.

En bref: une jeune Française paumée débarque - pour être stagiaire - dans ce petit camping du bout du monde tenu par deux femmes, une mère et sa fille. Après des débuts forcément un peu méfiants, les trois femmes tissent des liens, et des situations qui semblaient bloquées trouvent leur résolution. C'est tellement bien fait qu'au début on tourne les pages très vite... mais personnellement, arrivée au milieu j'ai un peu flanché. Le bestseller a un défaut: on finit par apercevoir un mécanisme d'horlogerie un peu trop parfait, et prévisible.

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Mardi 25 avril 2023

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Nous avons eu hier une très sympathique réunion chez Colette (merci à elle!), nous étions dix pour discuter du dernier livre de Le Clézio: un recueil de nouvelles intitulé "Avers". L'accueil de ce livre a été bon dans l'ensemble, même si chacun avait ses préférences.

En effet, un recueil de nouvelles est toujours un peu disparate. Il y a ici des nouvelles étalées sur probablement deux décennies, des courtes et des longues, des "réalistes" et d'autres plus proches du conte. Le lien thématique est que les histoires se situent en marge de notre monde européen, dans des sociétés et des paysages qu'autrefois on appelait "exotiques". Le romancier espère nous émouvoir par chacun de ces destins qu'il détaille, des destins de gens pauvres mais riches de leurs cultures ancestrales. Notre Europe les appelle "les indésirables", et elle essaie justement de les expulser à ses marges.

Presque dans chaque nouvelle il y a au centre un enfant, ou des enfants. Il y a des événements poignants, et des choses très dures à lire, si bien qu'il faut étaler la lecture sur plusieurs jours. La vie quotidienne dans la forêt tropicale était dure elle aussi, mais elle paraît représenter un paradis perdu, au regard de ces populations aujourd'hui chassées, déracinées, dispersées, parquées dans des non-lieux, avec la tristesse de tous ces jeunes sans avenir. Il passe aussi, dans les histoires, de beaux moments de chaleur humaine, des rencontres éphémères mais salvatrices pour ces enfants errants.

En fait ce livre est parfaitement actuel. Le Clézio se met clairement dans la filiation de la pensée décoloniale dont les grands noms ont été Frantz Fanon, Aimé Césaire, Edouard Glissant. Lui, il n'est pas martiniquais, mais son histoire personnelle, qui conjugue ses origines familiales (l'Ile Maurice et la Bretagne) avec ses recherches et séjours au Mexique et à Panama, l'a persuadé, lui aussi, que l'humanité est une et que tous, nous vivons dans le "tout-monde". Il présente ce recueil, avec raison, comme un texte engagé. Mais son discours ne serait qu'un discours de plus, s'il n'y avait pas son art. Au final, c'est quand même par son style que Le Clézio nous saisit. Il y a dans ce livre de très nombreux et beaux moments d'écriture poétique.

 

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Vendredi 17 mars 2023

Nous n'étions que huit vendredi chez Jeanne (cinq personnes excusées), mais l'ambiance était excellente.

Le livre de Florence Aubenas a rencontré une adhésion générale. Les articles d'un grand reporter sont-ils de la littérature? Réunis en volume (ici les années 2016-2022), ces articles d'abord publiés dans Le Monde appartiennent à un genre, la "non fiction", qui a été théorisé à partir des années 1960 (Truman Capote, "In Cold Blood", 1965) mais qui existait déjà entre les deux guerres (les reportages et les livres d'Albert Londres). Une variante d'aujourd'hui, sans impliquer de voyage: Emmanuel Carrère, avec sa couverture intégrale dans L'Obs du procès des attentats de janvier 2015.

Florence Aubenas a les qualités requises, elle est témoin, elle avance par rencontres successives et recueille des histoires vraies, et elle est courageuse, elle se met vraiment en danger. Sans doute ces reporters sont-ils accro à l'adrénaline qui accompagne leurs missions. Elle a un style simple et vivant, et même de l'humour. Seule réserve: par moments, c'est trop elliptique et on peut se perdre un peu au milieu des personnages et de la chronologie.

"Ici et ailleurs" nous plonge directement dans la première année de la guerre en Ukraine, et nous ramène aussi aux débuts du Covid, au printemps 2020 - ce qui est presque douloureux, tant cela a été affreux, et vu que nous essayons inconsciemment de refouler le souvenir de cette expérience dans l'oubli.

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Vendredi 10 février 2023

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Nous étions onze hier après-midi chez Elisabeth (merci à elle!), et trois personnes étaient excusées.

Le roman de l'écrivain autrichien Robert Seethaler, "Une vie entière" (de 2014), a donné lieu à une belle discussion.

C'est l'histoire d'un homme simple, issu d'un milieu déshérité, avec une enfance douloureuse, un horizon mental des plus limités, et une longue vie de labeur et de pauvreté, presque d'ascèse.

Plusieurs ont trouvé que c'était une histoire "triste". Il est vrai qu'on pense à rapprocher ce roman de certains films récents très sombres dont le cadre est aussi l'Autriche, celle d'avant 1914 (Michael Haneke, "Le ruban blanc") et celle d'avant 1939 (Terrence Malick, "A Hidden Life" (une vie cachée), dont le héros est aussi un homme simple, un paysan objecteur de conscience).

Mais je ferais aussi le rapprochement avec le conte de Flaubert "Un coeur simple"". Comme chez Flaubert, il se dégage de "Une vie entière" une sorte de sérénité, même si le ton du narrateur est souvent caustique entre les lignes. Il y a des passages émouvants (tout ce qui concerne le personnage de Marie), et d'autres qui touchent à l'humour noir. L'avis général était très favorable à ce livre, à cause de la manière dont le récit est construit, conçu, écrit.

Le héros, Andreas Egger, n'éprouve jamais d'amertume, il accepte toutes les épreuves en gardant sa dignité et son humanité. Avare de mots, extrêmement modeste, il cache une grande sensibilité et manifeste discrètement son ouverture aux autres et à la nature. Il y a de superbes évocations de paysages alpins - des atmosphères, des panoramiques, mais aussi des détails très précis. Et "toute une vie" se déroule devant le lecteur: la vie dans cette vallée perdue se déroule comme "en marge" du 20e siècle. La vallée absorbe les lointains échos de l'Histoire (l'Autriche nazie, les huit ans que Egger, mobilisé, passe en Russie, d'abord sur le front puis comme prisonnier), en même temps qu'elle profite des retombées douteuses de la modernité (la transformation de la montagne, avec l'industrie du ski, ou encore l'arrivée de la télévision).

Cette marginalité de la grande Histoire est accentuée par l'usage des ellipses: par exemple les vociférations d'Hitler à la radio ne sont évoquées qu'une fois, page 77. Ainsi, la vallée et le personnage restent étrangement intemporels, et l'écrivain lui-même trouve la formule p. 139: "cet entre-temps qu'était sa vie". L'auteur est né en 1966, il était adolescent dans les années 1980, époque où il a dû commencer à se poser des questions sur l'épisode nazi et plus généralement sur les horreurs du 20e siècle. Et ce livre peut être considéré aussi comme un apologue ou une métaphore renvoyant indirectement à ces questions. C'est donc un roman "historique" à sa façon, et aussi poétique et même philosophique. 

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Mercredi 11 janvier 2023

Merci à Agnès pour son accueil. Hier, c'était la fête d'Annie Ernaux: ses trois livres, Passion simple, L'usage de la photo et Le jeune homme, ont eu droit à une discussion très libre et animée.

Mais d'abord nous avons parlé du film Les années super 8. Une petite oeuvre filmique mais réussie, qui en dit pas mal sur la personnalité de l'auteure et comment elle a dû se dégager de la routine familiale pour trouver sa voix et son écriture. Elle s'y montre sous la figure de la chrysalide assoupie qui va s'envoler après le divorce. Presque toutes les familles des années 70 et 80 ont des petits films comme ça, mais en équipe avec son fils, le monteur et la musicienne, Annie Ernaux en a fait quelque chose d'original. Le texte qu'elle dit garde cette distance qui est sa marque. On a évoqué sa froideur, on ne la voit pas faire des câlins à ses petits garçons: mais nous ne connaissons pas les rushes, le film est le produit d'un tri très médité. Cette même distance se retrouve dans L'usage de la photo, un livre qui court sur la double trame de l'histoire d'un amour et de l'histoire d'un cancer.

C'est L'usage de la photo qui a été le plus discuté. Un livre écrit à quatre mains, avec des illustrations, apparemment sur une expérience à la fois amoureuse et photographique. Les auteurs devaient-ils reproduire ces photographies de tas de vêtements, ou s'en abstenir? Il manque les couleurs et dans ce fouillis grisâtre on ne distingue presque rien, à part les godasses et le soutien-gorge! Plaidoyer pour ce livre-objet: Gallimard ne pouvait pas mettre de la couleur; si les auteurs avaient voulu publier un livre d'art, ils seraient allés chez Skira; le côté "illisible" des photos donne plus d'importance aux textes, qui disent les formes et les couleurs; peut-être que les illustrations ne sont que des fantômes d'images, qui dénoncent le régime d'images "effréné" (mot de A. E.) qui s'est installé dans notre monde. Elle redonne toute sa place à l'imagination. Des étreintes des amants, on n'apprend presque rien, il n'y a pas de représentation. Les tas de vêtements ont rappelé à certains une exposition de Christian Boltanski au Grand Palais - leur amoncellement devait évoquer la Shoah. De là cette idée: L'usage de la photo relève de l'art en effet, mais de cet art contemporain particulier qui consiste en performances et en installations éphémères. Je parlais d'un livre-objet: c'est plutôt un objet d'art hybride, inclassable, qui témoigne d'un acte artistique révolu tout en inscrivant dans la durée (c'est imprimé, elle a posé "les scellés" p. 148) quelque chose d'impalpable et d'indicible.

L'éphémère est peut-être le mot qui caractérise l'érotique d'Annie Ernaux. Plus que sa façon d'écrire, sa façon de vivre librement va à l'encontre de la bien-pensance - quand elle ne choque pas, au moins elle déstabilise. Ses relations amoureuses sont toujours limitées dans le temps - une de ses préoccupations c'est d'ailleurs le temps, dans sa texture et ses dimensions, avec la dualité passé-présent, les moments parfaits (aussitôt disparus et oubliés - d'où l'obsession des traces indirectes), ou encore la pesanteur poisseuse de l'attente. On a objecté que, si elle est féministe, comment peut-elle devenir esclave de l'attente de l'homme, dans Passion simple? Mais il s'agit de la sujétion à la passion, qu'elle assume "librement". La passion n'est pas une expérience si répandue - c'est pourquoi certains adolescents sont saisis par les tragédies de Racine. On a évoqué Proust, Marcel et Albertine, et la jalousie qui semble être un marqueur de la passion. On a aussi un peu parlé du Jeune homme (quelques pages arrachées à la liste des amants...). Le plus intéressant dans ce petit texte, c'est comment Annie Ernaux retrouve avec ce jeune homme la jeune femme étudiante à Rouen qu'elle était au début des années 60. Encore le thème du temps. Mais retour aussi à l'autre Annie Ernaux, la transfuge de classe!